Il y a quelques années, quand il s’est inscrit à une formation sur le travail du métal proposée par la coopérative d’autoconstruction l’Atelier paysan, Kevin Piermay était encore paysan maraîcher. Aujourd’hui, il est l’unique salarié de Farming Soul, une association qu’il a cofondée en collaboration avec l’Atelier paysan.
Partager
Basée dans le Vaucluse, Farming Soul est une plateforme de conception, de développement et de diffusion de machines novatrices. Dans leur catalogue d’inventions : l’« aggrozouk », un porte-outils polyvalent à pédales et à assistance électrique ou « Alphonse la Pionce », un lit de travail qui permet de repiquer, désherber ou récolter en position allongée et qui peut se fabriquer à partir de deux vélos de récupération. Low-tech ? « Pour nous, ce sont avant tout des solutions socialement, écologiquement et économiquement appropriées, dans un contexte donné », explique Kevin Piermay, qui est l’un des concepteurs de ces outils dédiés aux petites et moyennes fermes maraîchères. L’association ne fabrique pas ces engins pour les vendre clés en mains. Son modèle repose, comme l’Atelier paysan, sur la formation et l’autoconstruction. « Et c’est à mon tour de partager mes connaissances avec d’autres paysans désireux, comme moi, d’accéder à l’autonomie technique en se réappropriant les techniques nécessaires pour réparer, modifier ou réinventer leurs outils de travail en fonction de leurs besoins », poursuit Kevin Piermay.
Formations
Neuf à dix fois par an, il réunit ainsi une dizaine de participants pour des sessions de formation de trois à cinq journées en moyenne avec, comme support la construction d’aggrozouks, sachant qu’il faut que trois personnes unissent leurs efforts pendant cinq jours pour fabriquer un exemplaire. « Certains deviennent des habitués et reviennent régulièrement pour approfondir leurs savoir-faire. Ils viennent parfois avec leur propre matériel, qu’ils souhaitent adapter à leurs besoins. » Les plus aguerris peuvent, quant à eux, se lancer dans l’autoconstruction sans assistance des outils développés par Farming Soul grâce aux plans 3D open source disponibles sur le site.
Pour l’heure, Kevin Piermay sillonne tout l’Hexagone au fil des formations qu’il anime, mais d’ici peu ses périples seront circonscrits à la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, sans ralentir le rythme car la demande est là. « Cela me permettra de développer des relations de proximité dans le temps avec les gens qui participent aux formations, explique-t-il. Et je pourrai proposer des rendez-vous personnalisés autour de la conception de nouveaux outils. C’est un domaine qui me passionne d’autant plus depuis que j’ai pris conscience que notre approche des technologies appropriées et notre vision des communs nous permettent d’avoir des temps d’incubation très courts, de l’ordre de deux ans, alors que les machinistes traditionnels ont besoin de sept ans pour développer leurs produits. Cela nous confère la possibilité – et la responsabilité – d’avoir un temps d’avance sur l’industrie et d’être aux premières loges des mutations du monde agricole. »